Professeur Jean-Dominique DEWITTE - CHRU DE BREST : Le rapprochement des politiques sociales, managériales et de prévention des risques dans les trois Fonctions publiques, représente une avancée profitable à tous

Le rapprochement des politiques sociales, managériales et de prévention des risques dans les trois Fonctions publiques, représente une avancée profitable à tous

|| Management des risques - Hôpital
/
01/02/2011
Professeur Jean-Dominique DEWITTE - CHRU DE BREST
Professeur Jean-Dominique DEWITTE
Chef de service Pathologies Professionnelles / Santé au travail
CHRU DE BREST


En quoi consiste un service de pathologie professionnelle / santé au travail ?

Ce service a une double fonction : la première est tournée vers les agents du CHU et des établissements extérieurs (médecine du travail des agents hospitaliers) ; la seconde, consultation de pathologies professionnelles, est ouverte à tous les salariés (en activité ou en retraite). Le rôle de ce service est de permettre aux salariés de faire le lien entre des symptômes et une pathologie professionnelle, de bénéficier d’examens complémentaires, d’être accompagnés dans la démarche de reconnaissance d’une maladie professionnelle…
Nous sommes également soutien technique à la médecine du travail : des médecins des entreprises ou des services de santé nous envoient leurs salariés pour des examens complémentaires nécessitant un matériel technique qu’ils n’ont pas.

Vous rencontrez les agents hospitaliers du CHRU de Brest en tant que chef de service de médecine du travail. Quelles sont les pathologies émergentes auxquelles vous êtes confrontés ?
En effet, mon service est en charge des consultations de médecine du travail des agents du CHRU. Cela représente 7 500 agents (nous sommes l’un des plus gros employeurs de la région, au 2e ou 3e rang des employeurs de Bretagne). Beaucoup de métiers sont représentés dans un hôpital et cela entraîne bien évidemment une multitude de risques : manutention, risques biologiques, infectieux, physiques…
Les TMS (essentiellement des lombalgies) sont toujours d’actualité mais la situation s’améliore grâce à la mise en place de campagnes de sensibilisation, aux achats de matériels permettant de soulager l’agent, aux formations gestes & postures… En second lieu, nous nous intéressons de près aux cancers professionnels ainsi qu’aux risques entraînés par les rayonnements ionisants et les traitements de chimiothérapie pour les agents.
Mais, la pathologie émergente est sans nul doute la souffrance mentale. Et cette situation n’est malheureusement pas réservée aux salariés du CHRU ou du secteur public. Néanmoins, depuis l’ouverture de la consultation en 1993, j’ai vu le mal-être des agents s’intensifier : manque de personnel, accroissement de la polyvalence des taches (sans vraiment y être formé), augmentation de la pression financière pour les hôpitaux…

Est-ce que les accords de novembre 2009 sont susceptibles d’améliorer la situation pour les hôpitaux ?
Parmi les trois Fonctions publiques, la Fonction publique hospitalière est certainement la moins concernée. Nous appliquons notre propre législation, basée notamment sur l’application du code de santé publique et du Code du travail. Notre situation à l’égard de la prévention des risques professionnels est proche de celle du régime général et notre politique de prévention des risques déjà organisée. Néanmoins, le rapprochement des politiques sociales, managériales et de prévention des risques dans les trois Fonctions publiques, la mise en commun d’outils et de compétences et le renforcement du dialogue social représentent assurément une avancée profitable à tous.

Comment voyez-vous l’évolution de votre métier dans ce contexte ?
A titre tout à fait personnel, je suis un peu inquiet spécialement face au problème de pénurie de médecins du travail. La médecine du travail voit ses effectifs chuter et le monde hospitalier n’échappe pas à cette réalité. De ce fait, nous ne parvenons pas à appliquer la législation, notamment l’obligation de visites médicales régulières pour les agents. Nous les rencontrons tous les deux ans et demi ou trois ans au lieu d’une fois à l’année. En ce qui concerne le risque chimique et de CMR, il y aurait beaucoup à faire : l’évaluation des risques n’est pas assez poussée, toujours par manque de médecins, mais aussi d’autres intervenants : ergonomes, intervenants en prévention des risques professionnels, psychologues...
La situation n’est pas prête de s’arranger car la discipline n’attire pas beaucoup les étudiants en médecine (enseignement en second cycle réduit à quelques heures, peur des contraintes législatives liées à la spécialité, réforme toujours en cours de discussion…)
Ainsi, le collège des enseignants auquel j’appartiens m’a chargé d’une mission pour mieux faire connaître la discipline (plaquette, information à l’université, site Internet…). Notre manière d’intervenir, à notre niveau, contribue à la dynamique nationale en faveur d’une restructuration de la médecine du travail.

Vous serez à Prévent’Ouest en mai prochain. Qu’en attendez-vous ?
Je connais bien l’événement pour y être intervenu il y a quelques années à la demande de la CNRACL. Je réitère l’expérience à Rennes dans quelques mois : je participerai à nouveau au congrès pour développer la thématique des risques chimiques et biologiques chez les agents hospitaliers.
Il est important pour le CHRU de Brest d’être présent à Prévent’Ouest : pour faire partager notre expérience et rencontrer nos homologues du privé et du public. Ce partage et l’échange d’informations aident chacun à progresser.