L’activité humaine est-elle nuisible à la fertilité ?

SANTE ET ENVIRONNEMENTS POLLUANTS || Risques chimiques / produits dangereux - CMR
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29/03/2012
Une étude publiée dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de l’INVS dresse un panorama des connaissances actuelles sur les liens existants entre les expositions professionnelles et la survenue d'anomalie de la reproduction

 

Une étude publiée dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de l’INVS dresse un panorama des connaissances actuelles sur les liens existants entre les expositions professionnelles et la survenue d'anomalie de la reproduction.

Depuis 25 ans, la préoccupation grandit vis-à-vis de la dégradation de l’environnement. On s’interroge sur les conséquences de l’activité humaine, progrès scientifiques, technologiques et industriels en tête, sur le dérèglement de la santé - humaine animale - et de la planète.
Le nombre d’allergies observées chez les enfants, du diabète, de maladies chroniques augmentent et l’on ne peut pas tout imputer au vieillissement de la population ou au dépistage plus précoce et systématique.
Autre observation alarmante depuis une vingtaine d’années : les activités industrielles humaines ne sont-elles pas en train de compromettre non seulement la santé des individus, mais aussi leur capacité à se reproduire et à perpétuer l’espèce ?

À l’origine de cette interrogation majeure : la publication en 1962 du livre de l’Américaine Rachel Carson, « Silent spring ». Elle y soutient la thèse selon laquelle des produits chimiques présents dans l’environnement pourraient avoir des conséquences sur la faune sauvage et sur la santé humaine, et même compromettre la capacité à se reproduire.
Depuis le début des années 1990, aux États-Unis et en Europe, cette question alimente un vif débat sur la détérioration de la santé reproductive humaine, aussi bien dans la communauté scientifique qu’au niveau du public, des médias, du monde industriel, des instances réglementaires et politiques.
La France a investi de nombreux moyens dans la recherche. Les choses bougent : en attestent de récentes initiatives parlementaires tel le vote de deux lois sur les perturbateurs endocriniens en 2011.

Dans un contexte où l’on entend parfois tout et son contraire, l’INVS a souhaité mettre de l’ordre dans l’importante littérature disponible. L’occasion de fournir des données valides et actualisées relatives à la fonction de reproduction masculine et féminine, et aux notions de fertilité et d’infécondité qui permettent de bien situer le problème et ses enjeux.
Objectif :

  • apporter des éléments de réponse aux questions que tout le monde se pose (où en sommes-nous dans la connaissance des perturbations de l’appareil reproducteur humain et de leurs évolutions dans le temps et dans l’espace ? Ces perturbations retentissent-elles sur la fertilité des individus et sur notre descendance ? Quelles sont les causes des phénomènes observés, quelle est la part du génétique et de l’environnemental?...)
  • éclairer les choix réalisés dans les orientations de la surveillance et de la recherche,
  • orienter en connaissance de cause les stratégies de prévention et de prise en charge des pathologies, enfin de construire des solutions appropriées.

Au sommaire de l’étude :

  • Éditorial
  • La fertilité des couples en France
  • Évolution temporelle et géographique des caractéristiques du sperme en France et dans le monde. Quo vadis ?
  • Évolution de la concentration spermatique en France entre 1989 et 2005 à partir des données de la base Fivnat  
  • Cryptorchidies et hypospadias opérés en France chez le garçon de moins de 7 ans (1998-2008)
  • Évolution nationale et variations régionales du taux de patients opérés pour cancer du testicule en France, 1998-2008
  • Fertilité et cancer du testicule : une revue de la littérature  
  • Mécanismes et enjeux de la perturbation endocrinienne
  • Relation entre exposition professionnelle, anomalies de la fertilité et troubles de l’appareil reproducteur : revue de la littérature récente

 

L’étude passe en revue les données disponibles sur la fertilité des couples en France, et donne un aperçu de résultats existant dans d’autres pays. On y apprend qu’environ un couple sur 4 à 6 qui arrête d’utiliser un moyen de contraception sera concerné par une infécondité involontaire d’un an.
La pertinence et les modalités d’un système de surveillance de la fertilité humaine sont discutées ; ce système devrait associer aux paramètres de fertilité du couple (infécondité involontaire, délai pour concevoir) un suivi de marqueurs biologiques des volets masculin et féminin de la fertilité.

Le système endocrinien est également passé au crible.
Ce système hormonal complexe est indispensable au maintien de l’ensemble des équilibres biologiques. Toute substance étrangère à l’organisme susceptible d’altérer ce fonctionnement est appelée « perturbateur endocrinien » (PE).
Depuis de nombreuses années, la problématique interpelle les chercheurs, le grand public et les organismes réglementaires. Des efforts ont été faits pour mieux comprendre leurs mécanismes d’action : mais au fur et à mesure des progrès réalisés en la matière, d’autres questions se posent.
La poursuite des travaux sur ces questions est donc essentielle pour mieux comprendre les modes d’action et prévenir la survenue de ces effets toxiques.

L'analyse de la littérature médicale montre notamment que l'exposition aux métaux lourds (plomb, cadmium) et aux radiations ionisantes, aux polluants atmosphériques urbains a des effets sur la fonction reproductive.
Les solvants et les pesticides figurent aussi parmi les principaux agents nocifs pour la reproduction.
Pour les autres expositions professionnelles, les études sont rares et leurs résultats souvent divergents, rendant leur interprétation difficile.

Même à des niveaux jusque-là considérés comme inoffensifs, il peut y avoir danger :

  • troubles de la fertilité : allongement du délai nécessaire à concevoir (DNC), infertilité…
  • perturbations hormonales,
  • malformations chez les enfants des parents exposés.
  • diminution des taux de testostérone,
  • âge à la ménopause plus élevé (chez les femmes exposées aux pesticides notamment),
  • fausses-couches spontanées (FCS) : observées notamment lors d’une exposition au plomb en milieu industriel ou au mercure chez les assistantes dentaires

 

Consulter le bulletin thématique : « Enjeux environnementaux pour la fertilité humaine » :

http://www.invs.sante.fr/Publications-et-outils/BEH-Bulletin-epidemiologique-hebdomadaire/Derniers-numeros-et-archives/Archives/2012/BEH-n-7-8-9-2012